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Plein Phare sur Penfret
30 juillet 2013

Archives militaires de Vincennes 1755 - 1756

 Quelques années plus tard, en 1754, en prévision d'une guerre qui ne devait pas tarder à éclater, le duc d'Aiguillon récemment nommé Gouverneur de Bretagne, reçut du Ministre de la Marine, Machault d'Arnouville, des instructions précises pour s'occuper de la défense des côtes. En ce qui concerne les Glénans, tous les avis exprimés jusqu'alors étaient favorables à l'établissement d'un fort dans l'île Cigogne, quand le Chevalier Des Roches, en réponse à une lettre du Ministre de la Marine, émit un avis différent dans un mémoire très remarquable que sa longueur seule m'a empêché de reproduire in-extenso [Note : Le Chevalier du Dresnay des Roches s'est signalé dans les guerres maritimes du XVIIIème siècle, et il a été Gouverneur général des Iles de France et de Bourbon].

Après avoir exposé la question sous ses différents points de vue, il arrive à la conclusion suivante : 

« Je crois n'avoir omis aucun des inconvénients qu'on peut imputer aux îles des Glénans dans leur état actuel, avoir prouvé que de ces inconvénients plusieurs sont imaginaires et que la Marine seule peut pourvoir aux autres, et je crois en conséquence, être en droit de conclure qu'il serait au moins inutile d'élever un fort sur l'île Cigogne ». 

Le Chevalier des Roches ajoutait même que si les corsaires prenaient Cigogne et s'y installaient, il faudrait une armée navale pour les en chasser. Cet avis fut combattu par Le Roger de la Sauvagere qui présenta, deux mois plus tard, son projet du fort de l'île Cigogne, dont il évalua la dépense à 200.000 livres. Ce projet, reconnaît-il, est combattu par les officiers de la Marine de Brest « pleins d'ardeur à se rendre utiles, mais alors il faudrait deux frégates coûtant chacune 30.000 livres pendant toute la durée de la guerre... et un coup de vent peut les éloigner ». 

En présence de ces avis contradictoires., le duc d'Aiguillon voulut examiner la question personnellement. Un. Nouveau plan de l'archipel, plus exact que les précédents, avait été dressé par Villeminot (2 juillet 1755) et, dès le 26 juillet suivant, le duc s'embarqua pour les Glénans. D'après son itinéraire, qui a été conservé, son navire mouilla successivement aux points suivants : Penfret, le Loc'h (nord-ouest et sud-est), Cigogne, Bananec, Saint-Nicolas et enfin dans la Chambre. 

L'établissement d'un fort à l'île Cigogne fut alors définitivement adopté, et de nouveaux projets furent demandés aux ingénieurs. 

Celui de Frézier, directeur des fortifications de Bretagne, comprenait une tour avec une enceinte bastionnée. Le projet de La Sauvagère consistait en batteries circulaires superposées occupant toute la surface de de l'île. Cet ingénieur proposa en même temps l'établissement d'une batterie circulaire au nord-nord-est de l'île Penfret.

(extrait du site la Piraterie aux Isles Glenan-relevé par Roger Frey) 

 

carte-penfret-aiguillon-1755

Carte des Isles des Glenans, tels qu'elles paraissent a la Basse Mer. le vée en présence de M.Le Duc d'Aiguillon, Commandant en chef de la Province de Bretagne le 26 juillet 1755, par le Sr Villeminot

extrait-du-toise-1755-penfret

plan-de-l'isle-penfret1755

Plan de l'Isle Penfret, la plus grande et la plus oriental des Isles de Glenans. Pour montrer la position d'une Redoute et Batterie fermée qui défende le Mouillage des parties de l'Est et de l'Ouest ou il y a assez d'eau pour de grosses Frégates et même de gros Vaisseaux et bonne tenue. L'on a marqué par des lignes rouges les cinq principakes direction des feux qui ont fait choisir le Pentagone pour le loligone du Fort et Redoute. A l'égard de la situation on a choisi la butte formée par la nature d'ou l'on découvre toutes ces parties. Echelle de 200 toises

pla-pointe-du-nord-penfret-1755

Pointe du Nord de l'isle de Penfret - 1755

plan-profil-batterie-penfret1755

Profil sur la ligne ABCDEF relatif au plan de la Batterie circulaire projettée sur la pointe du Nord de l'isle de Penfret l'une des Glenans - echelle 30 toises - 1755

 

  

plan-ile-cigogne1755

 En ce qui concerne le fort Cigogne, le projet, après avoir subi des réductions qui ramenaient le chiffre de la dépense à 115.000 livres, fut approuvé, ainsi que cela résulte d'une lettre, en date du 4 mai 1756, dans laquelle le Duc d'Aiguillon donne au Ministre quelques détails sur le commencement des travaux.

Voici cette lettre :

doc-duc-d'aiguillonn°12-1756

«  ILES DES GLÉNANS. Fort ordonné dans l'île . Quimper, le 4 Mai 1756. LE DUC D'AIGUILLON, Les Glénans, Monsieur, sont un assemblage de plusieurs petites îles et de roches qui forment de bons havres pour les barques, où les corsaires peuvent être à couvert de tous les vents et s'y tenir sans être vus de la côte. Ils y avaient fait un établissement pendant la dernière guerre, d'où ils couraient sur toutes les barques qui sortaient des rivières de Quimper, Quimperlé, du port de Concarneau, etc., etc., et sur celles qui faisaient le cabotage de Brest au Port-Louis et à Nantes. Ils firent un tort immense au commerce, à la pêche, et enlevèrent une quantité prodigieuse de matelots. Parmi ces îles, il n'y en a que trois qui aient quelque consistance, les autres n'étant que des rochers un peu étendus. La plus considérable est celle du Loc, mais elle est presque entièrement occupée par un étang d'eau saumâtre, et tout le reste est fort marécageux. L'île de Penfret a un terrain moins aquatique et qui pourrait produire, s'il était cultivé ; le mouillage y est fort bon dans la partie de l'est, mais, comme elle est un peu éloignée dans le sud des autres îles, sa position n'est pas aussi avantageuse. Celle de l'île Saint-Nicolas est beaucoup plus favorable : outre qu'elle est plus près de Concarneau, dont elle n'est éloignée que de trois lieues et demie, c'est elle qui, avec l'île de Cigogne, forme le port des Glénans qu'on appelle Chambre, où on entre à tout vent, et où on peut échouer sans aucun danger quelque temps qu'il fasse. Cet asile est d'un grand secours pour toutes les barques de pêche et de cabotage, soit qu'elles se trouvent assaillies d'une tempête, qui les empêche de gagner les ports de la Grande terre, soit qu'elles ne veuillent pas s'y affaler pour pouvoir continuer leur route plus aisément lorsque l'orage est passé. Le fort que vous avez ordonné de construire sur l'île Cigogne leur assurera cet abri, dont les corsaires se seraient bientôt emparé, sans cette protection.

La Cigogne est d'autant plus favorable à ces établissements qu'elle est très élevée, et domine sur toutes les autres îles, et principalement sur la Chambre, dont elle bat les deux entrées à la portée du fusil. D'ailleurs c'est un rocher vif dont le fort embrassera toute la circonférence, et dont les approches seront par conséquent impossibles. On ne pourra l'attaquer qu'en établissant des batteries sur l'île Saint-Nicolas, ce qui serait une opération longue et difficile, et, en supposant la brèche faite et praticable, on ne pourrait y arriver qu'en traversant à découvert un bras de mer dans lequel il reste même à basse mer deux ou trois pieds d'eau, dans une étendue de 400 toises, dans la partie la plus étroite. Je ne pense donc pas que ce fort puisse jamais être attaqué avec succès, et je suis persuadé que le commerce, le cabotage et la pêche en retireront de grands avantages ; mais je crains que les Anglais, qui les connaissent aussi bien que nous, ne nous donnent pas le temps de le mettre en état de défense, quelque diligence que nous puissions apporter à son exécution. J'ai pris toutes les précautions convenables pour l'assurer au moyen du détachement que je fais passer dans l'île Saint-Nicolas, et je suis très persuadé que les corsaires, quelque nombreux et hardis qu'ils puissent être, n'oseront pas l'attaquer ; mais, si les grands préparatifs que les Anglais font depuis si longtemps dans leurs ports ont pour objet quelque partie de la Bretagne, ils ne manqueront pas de commencer par s'emparer de ces îles, et, quelque ferme que soit l'officier que j'y place, quelque bien retranché qu'il soit, il n'est pas possible de se flatter qu'avec 50 hommes il puisse résister aux forces d'une escadre nombreuse qui aura résolu décisivement de le prendre. Il me semble que c'est le cas où, pour la certitude d'un grand bien, il faut risquer l'incertitude d'un petit mal.

J'ai l'honneur de vous envoyer le projet du fort que nous avons adapté à la forme de l'île et qui me parait remplir toutes les vues de défense de protection et de commodité qu'on peut avoir ; on l'exécutera si vous l'approuvez. La dépense, excède de 12.501 livres 2 sols 10 deniers celle que vous avez fixée, mois, comme on peut retrancher certains articles, qui ne sont que de commodité et peuvent par conséquent se différer, il n'y aura que 3.601 livres 3 sols 5 deniers à ajouter à la somme que vous avez déterminée ; et on les prendra, si vous l'approuvez, sur les 68.072 livres affectées au rétablissement des batteries. Le local n'a pas permis qu'on diminuât la capacité du fort, étant indispensable d'embrasser toute l'île, ainsi que j'ai eu l'honneur de vous le faire observer. D'ailleurs, la construction des barraques pour loger la troupe emporte une somme de 1.500 livres, qu'il n'est pas possible de retrancher.

Je vous supplie d'ordonner à M. de Morogues d'envoyer incessamment sur ces îles 4 pièces de canon de 22 et 2 de 8 avec leurs affûts, armement et munitions, afin que le détachement puisse s'y établir et être en état de s'y défendre et de protéger les ouvriers. Il n'est pas moins nécessaire que vous ayez la bonté d'ordonner à M. Hocquart d'affecter une chaloupe au service de ce poste, tant pour les besoins qu’il peut avoir dans la grande terre que pour faire passer soir et matin les ouvriers de l'île Saint-Nicolas, où ils logeront, à l'île Cigogne où ils travailleront, et les soldats qui les escorteront. J'ai écrit à M. de Conflans pour le prier de faire croiser une frégate dans cette partie, pour protéger les ouvriers, jusqu'à ce que l'établissement des troupes soit fait, et que les canons soient arrivés. Cette protection est d'autant plus nécessaire, qu'il y a paru un corsaire depuis quelques jours qui a fait deux prises assez considérables. Mais elle sera bientôt inutile, si les canons ne tardent pas à arriver, les baraques étant déjà fort avancées. Vous. connaissez, Monsieur, mon respectueux attachement pour vous. LE DUC D'AIGUILLON ».

Les travaux du fort Cigogne furent en effet commencés, mais ils se trouvèrent brusquement interrompus au bout de deux ans, car, à l'approche de la flotte anglaise, tous les ouvriers s'enfuirent. En 1768, les travaux n'avaient pas été repris, bien que les pièces de canons demandées eussent été envoyées, et qu’il y eût pour les servir cinq canonniers, dont « un maître », fournis par les bataillons gardes-côtes.

(extrait du site la Piraterie aux Isles Glenan) 

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